lundi 17 novembre 2014

Le Triangle d'hiver, Julia Deck, éditions de minuit.

C'est un des livres j'ai lus dans mon programme de Rentrée littéraire.
 Pour l'instant, c'est le mieux. 
(mais j'ai lu de sacrés navets pour l'instant)





On y suit "Mademoiselle", un personnage qui se construit et se déconstruit au fil du roman.

"Je vais prendre ce nom. Je vais l'adopter, m'y glisser, l'arborer sous toutes les coutures, devenir en tout point la femme suggérée par ces sons."

Mademoiselle commence donc par décider de son identité, elle a vu un film de Rohmer (non, le roman n'est pas aussi chiant qu'un film de Rohmer, et à part un intérêt certain pour l'espace, les trajets, les lieux, ça ne fait pas penser à du Rohmer, peu de dialogues, pas d'analyse psychologique, pas de tergiversations...)  et comme elle ressemble un peu à Arielle Dombasle, et qu'elle trouve chic d'être romancière, elle décide de devenir Bérénice Beauregard. Romancière. Comme dans le film dont elle a oublié le titre. Un type va y croire, c'est "l'Inspecteur" :

"Puis il reporte les yeux sur la jeune femme assise en face de lui et, dessinant dans l'air des formes obscures avec la pointe de sa fourchette, il demande Est-ce que tu me mettras dans ton roman ?"

On peut en profiter pour réfléchir à ce qu'est un personnage dans un roman, un personnage qui choisit son propre personnage, qui lui même est un personnage, qui lui-même écrirait des romans etc.  On peut aussi sans doute se demander ce qu'est une identité et  si le fait que ce personnage n'arrive pas à tremper sa madeleine Bonne Maman dans son thé ne serait pas une piste pour nous faire réfléchir aux liens entre l'identité et la mémoire, et se mettre, du coup, à y réfléchir...

"Se tourne alternativement vers la tasse et la madeleine, leur décochant son plus beau regard de méduse. Mais les objets résistent à cet interrogatoire et, de dépit, elle finit par verser le contenu de sa tasse dans un petit palmier en pot, engouffrant coup sur coup toutes les madeleines."

Sans doute que la romancière, qui a fait sa prépa à Henry IV il y a une vingtaine d'années, met un peu de ça dans le roman. Mais on peut aussi suivre tranquillement l'intrigue, qui, étonnamment, tient en haleine. Comment va continuer cette affaire de fausse identité ? et son histoire avec "l'Inspecteur"? et qui est cette Blandine Lenoir, qui a elle aussi le nom d'un personnage de Rohmer et qui traine dans le roman sans qu'on comprenne à quel moment elle va y trouver une place ?

Le roman avance comme ça, en suivant Mademoiselle : du Havre, à Saint Nazaire, à Marseille, à Paris... puis à nouveau au Havre.... c'est à la fois très concret et totalement irréel, un peu comme ces villes reconstruites que sont Le Havre ou Saint Nazaire, justement. Le style est simple, précis dans les descriptions, parfois un peu drôle. Il n'y a pas d'innovation stylistique insurmontable type "éditions de minuit".

Bref, c'est agréable à lire, et sans doute pas con. On se dit ça en le refermant, qu'on va y réfléchir... que c'était bizarre, qu'il y avait peut-être un truc, mais pas sûr non plus...  c'est le genre de livre qui va plonger certaines personnes (qui se reconnaîtront) dans des abîmes de perplexité : "Tu en penses quoi de ce livre ? c'est bien ? oui ? non ? j'ai pas compris ? je me dis que si je dis que c'est bien je vais passer pour une conne mais si je dis que c'est pas bien je vais aussi passer pour une conne, mais toi, tu en penses quoi ?".

Moi j'ai un peu bien aimé, oui. De là à l'acheter et le garder dans ma bibliothèque, non. De là à suivre la romancière si je n'y suis pas obligée, non plus. Chaque année je dois lire une trentaine des romans de la Rentrée littéraire, mais je n'en achète et n'en garde qu'un ou deux. Je n'ai pas la place de garder des livres que je ne relirai pas et dont j'aurai tout oublié d'ici peu... je suis un peu comme Mademoiselle, j'ai une mémoire qui gomme sa propre trace..


6 commentaires:

  1. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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  2. Critique qui tombe à point nommé. Ma collection de livres dont le titre est "Monsieur" avait cessé de s'agrandir... Je vais passer aux "Mademoiselle"... Tu as beau le rendre, moi j'ai des critères moins sélectifs. J'aime me laisser envahir. Je suis une petite Pologne à moi tout seul.

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  3. le titre n'est malheureusement pour toi pas "Mademoiselle", mais "Le Triangle d'hiver"... raté ! Je ne pense pas qu'il te plaise. Enfin, toujours mieux que ceux que j'ai lus avant....c'est certain.

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  4. "Le Triangle d'hiver" - un titre érotique ?

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  5. Ce n'est pas aussi chiant que du Rohmer, très bien. Mais est-ce aussi chiant que du Duras ? Le titre est un peu dur-durassien...

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    1. malheureusement j'ai déjà oublié ce dont traitait ce livre, je l'ai lu il y a une bonne semaine.... et comme je ne l'ai pas gardé et que j'en ai lu 2 autres entre temps... et qu'il ne m'a pas non plus marqué plus que ça...

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